En quoi les protéines laitières présentent-elles un intérêt particulier pour la gestion du poids ?
22 décembre 2021
Comme nous l’avons vu dans l’article intitulé « En quoi les protéines peuvent présenter un intérêt dans la gestion du poids ? », l’OMS alerte les populations en ce qui concerne les données relatives à l’obésité : plus de 2 milliards de personnes sont en surpoids dans le monde. Et ce chiffre ne cesse de grossir d’année en année.1
Nous insistions alors sur l’intérêt que peuvent représenter les protéines pour perdre du poids. Mais parmi toutes les sources de protéines que nous avons à notre disposition, toutes n’apportent pas les mêmes bénéfices. Et les protéines laitières présentent notamment certaines caractéristiques qui les rendent particulièrement intéressante dans ce domaine.
En quoi les protéines laitières constituent des protéines intéressantes pour la gestion du poids ?
Ces protéines sont intéressantes pour la perte de poids pour différentes raisons.
D’une part, les protéines de manière générale présentent un intérêt fort pour la gestion du poids. Elles ont en effet satiétogène à forte concentration, et elles stimulent la thermogénèse ainsi que l’augmentation de la masse musculaire.2 Tous ces éléments sont valables pour toutes les protéines, à des niveaux différents. Ceci a notamment été décrit plus en détails dans l’article « en quoi les protéines peuvent présenter un intérêt dans la gestion du poids ? ».
D’autre part, il existe deux types de protéines laitières : les protéines solubles (whey) et les caséines micellaires. Ces dernières constituent une source importante de calcium dont l’efficacité a été prouvée pour stimuler la perte de poids.3 4
L’efficacité du calcium pour stimuler la perte de poids a-t-elle vraiment été prouvée ?
Oui, de nombreuses études le démontrent. Prenons par exemple une étude de 2019 au cours de laquelle des sujets en surpoids (IMC > 25kg/m²) ont suivi un régime hypocalorique avec une activité physique modérée. Ils ont par ailleurs été divisés en trois groupes:5
- Le groupe C constituait le groupe contrôle ;
- Le groupe S a suivi une supplémentation en calcium (1500mg) et vitamine D (10µg) ;
- Le groupe D consommait 4 à 5 produits laitiers par jour (pour atteindre environ les mêmes quantités de calcium et vitamine D que le groupe S).
Les résultats concernant la perte de poids sont donnés sur la figure n°1. Le groupe D est celui qui a présenté, significativement, les meilleurs résultats à propos de la diminution des tours de taille, hanche et abdomen. Cependant, en ce qui concerne la diminution du poids, la différence peut sembler moins frappante. Ceci est dû au fait que les groupes C et S n’ont pas perdu que de la masse graisseuse : après 6 mois, le groupe C a perdu 2,1kg de masse maigre, 1,7kg pour le groupe S, et seulement 1,0kg pour le groupe D. Les produits laitiers, sources de calcium, vitamines D et de protéines (whey et caséines micellaires) ont permis un meilleur maintien de la masse musculaire et une perte de gras plus efficace.5
Figure n°1 : Pourcentage de changement concernant le poids (kg), l’IMC (kg/m²), le tour de taille (cm), de hanche (cm) et de l’abdomen (cm) après 6 mois de suivi du régime.5
C : groupe contrôle (n=30) / S : groupe supplément (n=37) / D : groupe produits laitiers (n=30)
En quoi le calcium permet-il de stimuler la perte de poids ?
Pour comprendre cela, il faut détailler certains points du métabolisme du calcium.
Le calcium joue un rôle important au sein des cellules adipeuses (qui stockent la masse graisseuse). Il a ainsi été démontré qu’une augmentation de la concentration en calcium au sein de ces cellules aurait pour effet d’augmenter l’accumulation de lipides (lipogenèse) et d’inhiber la dégradation de ceux-ci (lipolyse). Cette concentration en calcium dans les cellules est régulée par l’hormone parathyroïde et la forme active de la vitamine D (1,25-hydroxy vitamine D). Ceci est décrit sur la figure 2.2 6
L’activité de ces hormones peut être régulée par le calcium issu de notre alimentation. En effet, celui-ci aurait pour effet de réprimer l’action de ces hormones. Ceci aurait alors pour conséquence de réduire l’entrée du calcium dans les cellules adipeuses, et donc de réduire significativement l’accumulation de graisses et de stimuler au contraire la dégradation des lipides (figure 3).6 7
En d’autres termes, augmenter sa consommation de calcium permettrait de limiter le stockage tout en agissant comme un brûleur de graisses naturel. Une étude de 2003 a notamment démontré qu’une alimentation riche en calcium permettait en moyenne de multiplier la dégradation des graisses de 3 à 5 fois.6 7
Figure n°2 : Effet d’une alimentation inférieure aux besoins en calcium sur le métabolisme des lipides.6 7
① Manque de calcium alimentaire dans le milieu extracellulaire
② Activation de l’hormone parathyroïde et de la forme active de la vitamine D (1,25-hydroxy vitamine D).
③ Stimulation de l’entrée du calcium dans les cellules adipeuses
④ Entrée du calcium dans les cellules adipeuses activant la synthèse des lipides et inhibant leur dégradation
Figure n° : Effet d’une alimentation riche (supérieure ou égale aux besoins) en calcium sur le métabolisme des lipides.6 7
① Calcium alimentaire présent en quantité dans le milieu extracellulaire
② Inhibition de l’hormone parathyroïde et de la forme active de la vitamine D (1,25-hydroxy vitamine D).
③ Inhibition de l’entrée du calcium dans les cellules adipeuses
④ Le manque de calcium dans les cellules adipeuses active la dégradation des lipides et inhibe leur synthèse
Le second avantage du calcium est qu’il permet de limiter naturellement l’absorption des graisses. Ce phénomène a notamment été démontré avec les caséines micellaires dans une étude de 2015. Au cours de celle-ci, des sujets en surpoids consommaient un repas riche en graisses ainsi qu’une portion de protéines. Il pouvait s’agir de caséines, de whey classique ou bien de whey enrichie en α-lactalbumine. Les analyses ont ainsi permis de mettre en évidence une diminution de l’absorption des graisses de 22% en moyenne avec les caséines.8 Une seconde étude de 2001 a également noté qu’une consommation de calcium de 900mg/j permettait de multiplier par 2 l’excrétion de lipides, et de réduire la quantité de cholestérol LDL (couramment appelé le « mauvais cholestérol ») de 15% après seulement 2 semaines de supplémentation.9
En plus de cela, le calcium permettrait, de la même façon que les protéines, d’augmenter la thermogénèse et donc d’augmenter les dépenses énergétiques.2 10
Les caséines micellaires sont-elles plus intéressantes qu’un complément alimentaire de calcium ?
Les micronutriments (vitamines et minéraux) présents directement dans un aliment sont généralement mieux assimilés par l’organisme que ceux apportés sous forme libre dans un complément alimentaire. Ainsi, le calcium des caséines micellaires sera globalement mieux absorbé.2 3 11
Par ailleurs, les caséines représentent une bonne source de calcium avec environ 2600 mg/kg12mais aussi une excellente source de protéines d’intérêt pour la gestion du poids. Il est préférable de combiner tous les éléments favorisant le maintien du poids plutôt que de considérer un élément seul, comme le calcium. Ceci a notamment pu être mis en évidence dans l’étude de 2019 citée précédemment.5
Et la whey ? Présente-t-elle un intérêt particulier ?
Oui, la whey est une protéine particulièrement intéressante en ce qui concerne les effets satiétogènes court-terme. En effet, en comparaison avec d’autres sources de protéines, la whey est particulièrement efficace pour augmenter rapidement le sentiment de rassasiement, permettant ainsi de réduire les prises alimentaires.13 14
Par ailleurs, certaines études ont observé une diminution de la glycémie postprandiale (concentration en glucose sanguin après un repas) lorsque la whey est consommée avant un repas riche en glucides. Ceci a notamment été démontré au cours d’une étude de 2010 durant de laquelle des sujets sains ont consommé différentes quantités de whey avant un repas (de 10 à 40g). A la suite de celui-ci, la glycémie a été mesurée. Ainsi, les auteurs ont remarqué que plus les sujets consommaient de whey avant le repas, plus la glycémie était faible (effet maximal pour 40g de whey).15 Ceci peut être particulièrement intéressant pour les personnes ayant du mal à réguler leur prise alimentaire ou bien les sujets en surpoids cherchant à diminuer leur consommation énergétique.
Ainsi, les caséines micellaires ou, dans certaines mesures, la whey, peuvent représenter des protéines d’intérêt majeur pour la gestion du poids.
Pour plus d’informations, n’hésitez pas à nous contacter.
Auteurs : Rémi Maleterre & Audrey Boulier.
_______________________________________________________________________________________________
[1] « Obesity and overweight». World Health Organization. WHO. February 16, 2018 [consulted: july 09, 2019]. https://www.who.int/news-room/fact-sheets/detail/obesity-and-overweight
[2] D. Paddon-Jones, E. Westman, R.D. Mattes, R.R. Wolfe, A. Astrup, M. Westerterp-Plantenga (2008). Protein, weight management, and satiety. The American Journal of Clinical Nutrition, Volume 87, Issue 5, May 2008, Pages 1558S–1561S. Pub May 01, 2008. https://doi.org/10.1093/ajcn/87.5.1558S
[3] S. Schrager (2005). Dietary Calcium intake and obesity. J Am Board Fam Pract. 18(3):205-10. Pub May 2005.
[4] M. Van Loan (2009). The role of dairy foods and dietary calcium in weight management. Journal of the American College of Nutrition. 28:supp1, 120S-129S. Epub June 14, 2013. https://doi.org/10.1080/07315724.2009.10719805
[5] J.Z. Ilich, O.J. Kelly, P.Y. Liu, H. Shin, Y. Kim, Y. Chi, K. Wickrama, I. Colic-Baric (2019). Role of Calcium and low-fat dairy foods in weight-loss outcomes revisited: results from the randomized trial of effects on bone and body composition / obese postmenopausal women. Nutrients 2019, 11(5), 1157. Epub May 23, 2019. https://doi.org/10.3390/nu11051157
[6] M.B. Zemel (2003) Mechanisms of dairy modulation of adiposity. J Nutr 2003;133:252S–6S. Pub January 2003. https://doi.org/10.1093/jn/133.1.252S
[7] M.B. Zemel (2002). Regulation of adiposity and obesity risk by dietary calcium: mechanisms and implications. J Am Coll Nutr 2002;21:146S–51S. Pub April 2002.
[8] F. Mariotti, M. Valette, C. Lopez, H. Fouillet, M.H. Famelart, V. Mathé, G. Airinei, R. Benamouziq, C. Gaudichon, D. Tomé, D. Tsikas, J.F. Huneau (2015) Casein compared with whey proteins affects the organization of dietary fat during digestion and attenuates the postprandial triglyceride response to a mixed high-fat meal in healthy, overweight men. J Nutr 145, 2657–2664. Pub December 2015. https://doi.org/10.3945jn.115.216812
[9] Y. Shahkalili, C. Murset, I. Meirim, E. Duruz, S. Guinchard, C. Cavadini, K. Acheson (2001) Calcium supplementation of chocolate: effect on cocoa butter digestibility and blood lipids in humans. Am J Clin Nutr 2001;73:246 –52. Pub February 2001. https://doi.org/10.1093/ajcn/73.2.246
[10] H. Shi, A.W. Norman, W.H. Okamura, M.B. Zemel (2001). 1alpha25-Dihydroxyvitamin D3 inhibits uncoupling protein 2 expression in human adipocytes. FASEB J 2002;16:1808 –10. Pub December 2001. https://doi.org/10.1096/fj.01-0584fje
[11] M. Zemel, W. Thompson, A. Milstead, K. Morris, P. Campbell (2004). Calcium and dairy acceleration of weight and fat loss during energy restriction in obese adults. Obes Res 2004;12:582–90. Pub April 2004. https://doi.org/10.1038/oby.2004.67
[12] Ingredia. Prodiet 87 B Fluid – Nutrition facts . December 11, 2015.
[13] B.L. Luhovyy, T. Akhavan, G.H. Anderson. (2007). Whey proteins in the regulation of food intake and satiety. Journal of the American College of Nutrition, Vol 26, Issue 6, p704S-712S. Epub June 14, 2013. https://doi.org/10.1080/07315724.2007.10719651
[14] S. Pal, S. Radavelli-Bagatini, M. Hagger, V. Ellis. (2014). Comparative effects of whey and casein proteins on satiety in overweight and obese individuals: a randomized controlled trial. European Journal of Clinical Nutrition. 68, 980-980. Epub May 07, 2014. https://doi.org/10.1038/ecjn.2014.84
[15] T. Akhavan, .L. Luhovyy, P.H. Brown, C.E. Cho, G.H. Anderson (2010). Effect of premeal consumption of whey protein and its hydrolysate on food intake and postmeal glycemia and insulin responses in young adults. The American Journal of Clinical Nutrition, Volume 91, Issue 4, April 2012, 966-975. Epub April 4, 201. https://doi.org/10.3945/acjn.2009.28406