Quels aliments peuvent contribuer au maintien à domicile des personnes âgées ?
3 novembre 2020
En France, les personnes âgées de plus de 75 ans représentent près d’une personne sur 10 selon les estimations réalisées par l’INSEE en 2019.1 Parmi elles, seules 10% fréquentent ou vivent dans un établissement d’hébergement pour personnes âgées.2 La majorité de cette tranche de la population reste donc à domicile avec une dépendance variable.
Avec l’âge, on observe des changements de mode de vie dus au déclin des capacités physiques et à l’évolution de l’état psychologique. Ceci peut ainsi se traduire par une diminution de l’activité physique accompagnée d’une réduction des apports alimentaires. La perte de poids peut alors être importante, ce qui n’est pas sans risque pour une personne âgée : des maladies comme la sarcopénie ou l’ostéoporose peuvent survenir.3 4
Il apparaît ainsi indispensable de pouvoir apporter des produits adaptés aux personnes âgées pour s’assurer que leurs apports alimentaires restent suffisants. En effet, ceux-ci peuvent s’avérer importants afin de maintenir des apports alimentaires adaptés et ainsi conserver un mode de vie sain.
Une étude statistique américaine de 2018 a notamment révélé qu’un mode de vie sain (bonnes habitudes alimentaires et apports adéquats, consommation modérée d’alcool, etc…) permettrait potentiellement d’augmenter la durée de vie de 12,2 ans pour les hommes et de 14 ans pour les femmes.5 A titre comparatif, la durée de vie moyenne aux Etats-Unis est de 78,5 ans (donnée de 2017).6
Pourquoi faut-il des produits « adaptés » aux personnes âgées ? Les produits courants ne suffisent-ils pas ?
Les produits alimentaires courants ne doivent évidemment pas être écartés. Mais de nombreuses études ont démontré que les apports alimentaires ont fortement tendance à diminuer avec l’âge.3 7 8 9 On estime qu’entre l’âge de 20 et 80 ans, les apports énergétiques baissent en moyenne de 600 et 1300kcal respectivement chez les femmes et les hommes.10 Ceci représente une diminution des apports énergétiques moyens pouvant aller jusqu’à 50%. Une telle diminution des apports n’est pas sans conséquence sur l’organisme : diminution des capacités cognitives et physiques, augmentation de la fatigue, affaiblissement du système immunitaire, etc… Une méta-analyse de 2018 a notamment démontré que la qualité de vie des personnes âgées était directement liée à leurs habitudes alimentaires. 11
Par conséquent, des suppléments alimentaires peuvent être nécessaires pour mieux couvrir les besoins énergétiques des personnes âgées. Trois types de produits existent alors :
- Les compléments alimentaires, qui peuvent s’avérer utiles pour apporter des vitamines, minéraux ou d’autres nutriments essentiels comme les omégas 3. L’inconvénient majeur de ceux-ci est qu’ils peuvent être difficiles à avaler pour certaines personnes âgées, notamment ceux souffrant de dysphagie (difficulté à avaler). De plus, ces produits peuvent être perçus par les personnes âgées comme des médicaments. Une certaine aversion peut donc parfois être observée.
- Les aliments fonctionnels, c’est-à-dire des aliments semblables en apparence à des aliments conventionnels, mais renfermant un ou plusieurs éléments bénéfiques pour la santé.12 Ceux-ci vont souvent contenir un concentré de nutriments essentiels. Ils peuvent par exemple être présentés sous la forme de boissons lactées, de crèmes dessert ou même de potage.
- Les produits « manger-main », qui sont des aliments classiques mais dont la forme et la consistance permettent d’être mangés avec les doigts. Ces aliments vont généralement être des concentrés d’énergie et de nutriments essentiels. L’avantage de ces produits est qu’ils sont simples à manger pour les personnes âgées ayant du mal à utiliser des couverts (comme les patients souffrant de la maladie de Parkinson). De plus, ils peuvent être facilement ajoutés dans un plat ou être consommés à tout moment de la journée sans forcément être à table.
Quels sont les nutriments que l’on doit retrouver en priorité dans ces produits adaptés aux personnes âgées ?
Nous avons vu précédemment que les apports énergétiques des personnes âgées étaient bien souvent insuffisants. Un produit destiné à ces populations pourrait donc être un condensé d’énergie et donc être plus riche en graisses. Les lipides sont en effet les nutriments les plus énergétiques : les glucides et protéines représentent approximativement 4kcal/g tandis que les lipides 9kcal/g. Concernant la qualité de ces graisses, l’idéal est de maximiser les omégas 3 puisqu’il s’agit d’acides gras essentiels trop peu présents dans l’alimentation courante. Différentes études épidémiologiques ont notamment démontré qu’une consommation accrue d’omégas 3 permettrait de limiter le risque d’accidents vasculaires ainsi que les déclins cognitifs.10 13 14
Les protéines sont également extrêmement importantes pour les personnes âgées puisqu’elles permettent de maintenir l’intégrité de leur masse musculaire et osseuse. Ceci permet ainsi à ces populations de mieux préserver leurs capacités physiques. Pour plus d’informations, nous avons abordé ce sujet dans plusieurs de nos articles de blog :
- « Quels sont les besoins protéiques des seniors et personnes âgées ?«
- « Quelles sont les protéines les plus adaptées pour répondre aux besoins des seniors ? »
- « En quoi les protéines sont-elles bénéfiques pour la santé osseuse ? »
Avec l’âge, une certaine résistance anabolique A peut survenir. En d’autres termes, une petite quantité de protéines peut ne plus suffire à stimuler la synthèse musculaire.15 Cependant, il reste possible de contrebalancer ce phénomène en apportant une quantité suffisante d’acides aminés essentiels B et notamment de Leucine, l’acide aminé le plus important pour stimuler l’anabolisme.16 17 Ainsi, une dose comprise entre 2 et 3g de Leucine représenterait la quantité minimale par prise alimentaire pour stimuler correctement l’anabolisme chez les personnes âgées.15 18 19
Par ailleurs, il est important de souligner que l’alimentation seule ne suffit pas : une activité physique (même simplement marcher) est indispensable afin de maintenir les muscles stimulés. Pour davantage de précisions, consultez notre article sur les besoins protéiques des seniors et personnes âgées.
L’ajout de micronutriments peut également être intéressant. D’après les recommandations issues de la review de 2016 Nutrition recommendations in elderly and aging. Medical Clinics of North America, les nutriments dont l’insuffisance est courante et représentant le plus de risque pour la santé sont la vitamine D et B12, ainsi que le Calcium. Il s’agit donc des trois micronutriments à inclure en priorité dans les produits destinées aux personnes âgées.19
Si les aliments sont plus énergétiques, les personnes âgées ne risquent-elles pas de manger moins pour compenser ?
Non, à condition que le volume du plat ne varie pas. Une étude menée en milieu hospitalier sur 36 patients âgés de 52 à 96 ans a en effet révélé que le volume de nourriture ingéré entre un plat ordinaire et un plat à la densité énergétique supérieure est négligeable. Ainsi, il est possible d’augmenter significativement les apports énergétiques en apportant des produits alimentaires à haute densité énergétique.20
Quels aliments doivent contenir ces produits adaptés aux personnes âgées ?
Tous les aliments ne peuvent pas convenir aux personnes âgées. Non pas pour des raisons de santé, mais simplement pour le côté hédonique du produit. Comme nous l’avons vu précédemment, on observe souvent un déclin de l’appétit avec l’âge. Le produit doit donc être le plus appétissant possible pour que la personne âgée ait envie de le consommer.8
Une étude de 2008 du Journal of Nutrition Health and Aging suggère que plus des aliments suscitent des émotions négatives (dégoût, indifférence, inquiétude, doute, frustration, déception, lassitude), plus le risque de sous-nutrition est important. Il semble ainsi primordial de sélectionner des aliments suscitant des émotions positives chez ces populations.21
Quels aliments peuvent susciter ces émotions positives chez les personnes âgées ?
Une étude de 2006 démontre que les plats préférés des personnes âgées semblent être ceux dont la préparation reste traditionnelle et dont les produits sont des aliments qui leur sont familiers. Il faut donc oublier les méthodes de préparation trop élaborées et les aliments sortant de l’ordinaire et rester dans ce que les personnes âgées connaissent.22
Ainsi, les aromatisations doivent toujours rester simples : vanille, chocolat, caramel, café… Par ailleurs, il n’est pas rare que les capacités sensorielles diminuent avec l’âge. Le goût et l’odorat pouvant faiblir, il apparaît nécessaire de relever davantage les saveurs des aliments et de proposer des arômes plus forts que ceux utilisés traditionnellement.
Ces aliments doivent-ils répondre à certaines exigences particulières ?
Outre les nutriments et l’aspect hédonique vus précédemment, les produits à destination des personnes âgées doivent avoir une forme et une texture adaptées pour répondre aux problématiques imposées par certaines maladies. La dysphagie et la xérostomie (sécheresse buccale) imposent notamment aux produits d’adopter une texture particulière.23
Il peut également être pertinent de présenter les produits sous forme de bouchées afin qu’ils puissent être consommer sans couverts. Dans cette mesure, les produits « manger-main » peuvent être tout particulièrement intéressants.
Pour conclure, pour être parfaitement adapté aux personnes âgées, un produit alimentaire doit :
- Être énergétique et source de nutriments indispensables, notamment des vitamines (D et B12), des minéraux (calcium) ainsi que des protéines. A noter que pour ces dernières, il est important de sélectionner une protéine riche en Leucine. De ce fait, les protéines laitières peuvent s’avérer très pertinentes, le whey contenant 11,7% de Leucine et les caséines micellaires 9,2%. *
- Être attractif, il doit susciter des émotions positives. Mais il ne doit pas pour autant être trop extravagant : les personnes âgées préfèrent généralement les produits qui leur sont familiers.
- Être facile à consommer, donc avoir une texture et une forme adaptée (pas trop dur, ni trop sec par exemple).
* les valeurs de Leucine données correspondent à celles mesurées dans les produits Prodiet® 80S pour le whey et Prodiet® Fluid pour les caséines micellaires. Ces produits sont développés par Ingredia.
* A [Acide aminé essentiel] : Acide aminé que l’organisme n’est pas capable de synthétiser et qu’il est indispensable d’apporter par l’alimentation
* B [Biodisponible] : relatif à l’absorption et l’utilisation d’un élément par l’organisme. Plus un nutriment est biodisponible, plus celui-ci est absorbé et utilisé par l’organisme.
Pour plus d’informations, n’hésitez pas à nous contacter.
Auteurs : Rémi Maleterre & Audrey Boulier.
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[1] “Population Par Âge − Tableaux de l’économie Française | Insee,” accessed April 9, 2020, https://www.insee.fr/fr/statistiques/3676587?sommaire=3696937.
[2] DREES, “728 000 Résidents En Établissements d’hébergement Pour Personnes Âgées En 2015,” Études & Résultats, 2015, https://drees.solidarites-sante.gouv.fr/IMG/pdf/er1015.pdf.
[3] Sonya Brownie, “Why Are Elderly Individuals at Risk of Nutritional Deficiency?,” International Journal of Nursing Practice 12, no. 2 (2006): 110–18, https://doi.org/10.1111/j.1440-172X.2006.00557.x.
[4] Alfonso J. Cruz-Jentoft et al., “Prevalence of and Interventions for Sarcopenia in Ageing Adults: A Systematic Review. Report of the International Sarcopenia Initiative (EWGSOP and IWGS),” Age and Ageing 43, no. 6 (November 1, 2014): 748–59, https://doi.org/10.1093/ageing/afu115.
[5] Yanping Li et al., “Impact of Healthy Lifestyle Factors on Life Expectancies in the US Population,” Circulation, July 2018, https://doi.org/10.1161/CIRCULATIONAHA.117.032047.
[6] “Indicateurs de Développement Dans Le Monde – Google Public Data Explorer,” accessed August 30, 2020, https://www.google.com/publicdata/explore?ds=d5bncppjof8f9_&met_y=sp_dyn_le00_in&idim=country:USA:GBR:CAN&hl=fr&dl=fr#!ctype=l&strail=false&bcs=d&nselm=h&met_y=sp_dyn_le00_in&scale_y=lin&ind_y=false&rdim=world&idim=country:USA&ifdim=world&hl=fr&dl=fr&ind=false.
[7] J. E. Morley, “Decreased Food Intake With Aging,” The Journals of Gerontology Series A: Biological Sciences and Medical Sciences 56, no. Supplement 2 (October 1, 2001): 81–88, https://doi.org/10.1093/gerona/56.suppl_2.81.
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[9] Lorenzo M. Donini, Claudia Savina, and Carlo Cannella, “Eating Habits and Appetite Control in the Elderly: The Anorexia of Aging,” International Psychogeriatrics 15, no. 1 (March 2003): 73–87, https://doi.org/10.1017/S1041610203008779.
[10] Riccardo Calvani et al., “Current Nutritional Recommendations and Novel Dietary Strategies to Manage Sarcopenia,” The Journal of Frailty & Aging 2, no. 1 (2013): 38–53.
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[12] karine Pierre-Lecocq, “Aliment fonctionnel,” CERIN, accessed April 9, 2020, https://www.cerin.org/glossaire/aliment-fonctionnel/.
[13] Institute of Medicine (US) Food Forum, Nutrition Concerns for Aging Populations, Providing Healthy and Safe Foods As We Age: Workshop Summary (National Academies Press (US), 2010), https://www.ncbi.nlm.nih.gov/books/NBK51837/.
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[15] Benoit Smeuninx et al., “Age-Related Anabolic Resistance of Myofibrillar Protein Synthesis Is Exacerbated in Obese Inactive Individuals,” The Journal of Clinical Endocrinology and Metabolism 102, no. 9 (July 14, 2017): 3535–45, https://doi.org/10.1210/jc.2017-00869.
[16] Imanipour Vahid et al., “The Effects of Branch-Chain Amino Acids on Fatigue in the Athletes,” Interventional Medicine & Applied Science 10, no. 4 (n.d.): 233–35, https://doi.org/10.1556/1646.10.2018.10.
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[19] Hope Barkoukis, “Nutrition Recommendations in Elderly and Aging,” The Medical Clinics of North America 100, no. 6 (November 2016): 1237–50, https://doi.org/10.1016/j.mcna.2016.06.006.
[20] Ann Ödlund Olin et al., “Energy-Enriched Hospital Food to Improve Energy Intake in Elderly Patients,” Journal of Parenteral and Enteral Nutrition 20, no. 2 (1996): 93–97, https://doi.org/10.1177/014860719602000293.
[21] Issa Narchi et al., “Emotions Generated by Food in Elderly French People,” The Journal of Nutrition, Health & Aging 12 (February 1, 2008): 626–33, https://doi.org/10.1007/BF03008273.
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[23] E. Rothenberg and K. Wendin, “7 – Texture Modification of Food for Elderly People,” in Modifying Food Texture, ed. Jianshe Chen and Andrew Rosenthal (Woodhead Publishing, 2015), 163–85, https://doi.org/10.1016/B978-1-78242-334-8.00007-9.